Retour sur la Fête de l'Huma 2014

La semaine dernière avait lieu la célèbre Fête de l'Huma, le fameux rassemblement des militants et sympathisants communistes, au Parc de la Courneuve [1]. Organisée, comme chaque année, par le quotidien du même nom et créé par Jean Jaurès en 1904, cet événement est l'occasion de tables rondes, de débats d'idées, mais aussi de spectacles musicaux. Depuis sa création en 1930, la Fête de l'Huma a ainsi accueilli de nombreux artistes français, mais aussi internationaux, parmi lesquels Pink Floyd (1970), The Who (1972), ou encore Genesis (1978) [2], contribuant à les populariser auprès du public français. Il faut dire que la scène, d'une grande capacité, permet d’accueillir presque 100 000 spectateurs pour un prix modique [3], ce qui suscite l'intérêt des fans.

Cette année, quelques semaines après avoir célébré le centenaire de l'assassinat de Jean Jaurès - tué à l'aube de la Première Guerre Mondiale - cette édition revêtait un caractère bien particulier, presque symbolique. En effet, l'homme, figure du socialo-communisme en France, aurait certainement eu son mot à dire, au moment même où les politiques s’interrogent sur la place de l'état dans l'économie ou sur l'orientation à donner au modèle social, enjeux cruciaux pour l'avenir.

De cette édition, la presse n'a pourtant retenu que l'apparition de Jean-Luc Mélenchon, candidat représentant des communistes à la dernière présidentielle, qui était accompagné de Jérôme Kerviel, ancien trader à la Société Générale. Cette association, pour le moins hétéroclite, n'a pas manqué de faire réagir, certains ne comprenant pas ce que Kerviel, incarnation de la fameuse "finance folle", faisait à la fête des prolétaires. L'homme politique s'est alors empressé de leur répondre, en défendant le trader, n'hésitant pas à le comparer à Alfred Dreyfus, un officier accusé injustement d'intelligence avec l'ennemi à la fin du XIXème siècle et que Jaurès avait soutenu [4]. De là à se prendre pour lui, il n'y a qu'un pas.

Hormis les photos de quelques anonymes et politiques tenant dans leurs mains des pancartes sur lesquelles on pouvait lire "Ma gauche à moi, elle..." compléter les points de suspension [5], un autre petit élément a attiré mon attention : la tête d'affiche de la programmation musicale, en l'occurrence le groupe de hard rock allemand Scorpions.
Programmation musicale de la Fête de l'Huma 2014 (source : site officiel)

Pour ceux d'entre qui seraient un peu trop jeune, sachez que ce groupe a écrit une chanson en 1990 intitulée Wind of Change, c'est-à-dire, traduit littéralement, "Vent de Changement". Sortie à une époque où les pays de l'est, et notamment la RDA, se libère du joug communiste - la chute du mur est intervenue peu de temps avant -, cette chanson est devenue l'hymne de la réunification allemande ainsi qu'un appel à la liberté. Elle annonce aussi, avec quelques mois d'avance, le changement qui interviendra en URSS avec la dislocation de l'empire communiste. Tout un symbole.
Clip de la chanson Wind of Change sur YouTube.

Il est donc particulièrement savoureux de voir ce groupe se produire à la Fête de l'Huma en cette année 2014. Étonnant aussi que les organisateurs aient pensé à lui, alors même que leurs idées politiques sont si différentes. Voir Scorpions chanter Wind of Change au milieu d'une foule de sympathisants communistes constitue une sorte de pied de nez de l'histoire, un message subliminal à la foule comme pour lui dire que ses idées sont révolues et définitivement archaïques. Autrement dit, bonnes à illustrer les livres d'histoire avec la mention "nuit gravement à votre liberté". Est-ce que la foule a pu saisir ce message ? Beaucoup doivent en douter, surtout quand ils entendent à longueur de journée les dirigeants politiques vitupérer contre le ultralibéralisme et son cousin par alliance le capitalisme. Une raison de plus de croire qu'il y a grand besoin d'un nouveau vent de changement dans ce pays...

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[1] Depuis 1960. Avant cela, elle a été organisée à plusieurs endroits dont le Parc de Vincennes ou dans la ville de Montreuil.
[2] Liste non exhaustive. Une plus complète est disponible ici.
[3] On passera sous silence les éventuelles subventions perçues par l'organisation de l'événement.
[4] Le comte-rendu de la visite de J.-L. Mélenchon par le Magazine Le Point est disponible à ce lien.
[5] Pour voir à quoi cela ressemble, allez sur le compte Twitter du PCF. 

Macron sur l'illettrisme : le coup de pied dans la fourmilière

"Il y a dans cette société une majorité de femmes et il y en a qui sont pour beaucoup illettrées. On leur explique "vous n'avez plus d'avenir à GAD ou aux alentours, allez travailler à 50 ou 60 km". Ces gens-là n'ont pas le permis de conduire ! On va leur dire quoi ? "Allez passer le permis de conduire, allez attendre un an"? Ça ce sont des réformes du quotidien."
Cette déclaration, faite hier matin par le nouveau ministre de l'économie, Emmanuel Macron, alors qu'il était interrogé sur le sort des salariés des usines GAD en Bretagne, a suscité l'indignation sur les réseaux sociaux - Twitter en tête - pendant une bonne partie de la journée. Rapidement accusé de "mépris" envers les petites gens employés dans cette entreprise, M. Macron a été contraint, sous la pression médiatique, de s'excuser dans la soirée. Un faux pas pour le jeune ministre, lui qui à peine nommé par Manuel Valls, avait déjà dû essuyer les attaques de la presse et d'une partie des responsables politiques concernant son parcours professionnel : diplômé de l'ENA et ancien collaborateur d'une grande banque, il n'était pas l'incarnation de la gauche luttant contre la "finance". Cette remarque du ministre vient renforcer cette impression, en plus d'être désastreuse pour la majorité au pouvoir, déjà affaiblie quelques temps auparavant par l'affaire des "sans-dents", expression par laquelle François Hollande désignerait les plus modestes des Français [1].

Cette longue succession de malentendus, de déclarations à l'emporte-pièce et de reculades systématiques devant les obstacles, a, petit à petit, envenimé les relations entre l'exécutif et la population depuis le début du quinquennat. Et si on ajoute à cela les mauvais chiffres économiques, c'est la goutte qui fait déborder le vase.

Pourtant, j'ai ici envie de prendre la défense d'Emmanuel Macron. Bien que maladroits sur la forme, ses propos n'en reflètent pas moins une vérité criante qui peut se résumer en un chiffre : aujourd'hui, en France, environ 7% de la population souffre d'illettrisme [2], autrement dit, éprouve des difficultés à déchiffrer des textes ou à écrire. Pour l'entreprise GAD, cette statistique grimpe à 20%. Dès lors, dire que le ministre de l'économie a insulté ces salariés est un contresens : il n'a fait qu'énoncer une vérité souvent ignorée par la classe politique.

La question n'est donc pas de savoir si Emmanuel Macron a fait une erreur en disant cela, mais de trouver des solutions pour remédier au problème de illettrisme en France. A la vue des chiffres de l'entreprise GAD, le Gref de Bretagne a tenté de réagir en proposant une série de formations, afin d'aider les salariés à acquérir ou réacquérir les savoir-faire fondamentaux. Car, au final, ces personnes sont confrontées, tous les jours, dans ou en dehors de leur travail, à des factures, des contrats, des panneaux de signalisation, etc. autant d'écueils qui deviennent une torture quand on ne maîtrise pas la lecture et l'écriture. Un véritable handicap qui leur interdit, aussi, de pouvoir aider leurs enfants à faire leurs devoirs ou d'avoir accès à la culture.

Sur un plan plus économique, l'illettrisme a des conséquences encore plus regrettables, comme l'a d'ailleurs fait remarquer le ministre. Comment ces personnes gens, privées de connaissances élémentaires en lecture et en écriture, peuvent obtenir et réussir des formations professionnelles ou se reconvertir après la perte d'un emploi ? Impossible avec de telles lacunes. Confrontés à cette situation, les illettrés se retrouvent le plus souvent dans le cul-de-sac de Pôle Emploi, ayant peu de compétences et une maigre expérience à faire valoir auprès d'un employeur. Les plus débrouillards peuvent espérer trouver des petits boulots, mais pour les autres, se sentant exclus de la société et honteux de leur condition, retrouver un emploi capable de subvenir à leurs besoins relève du parcours du combattant. Et qui dit chômage de longue durée, dit vie précaire et pauvreté. Un cercle vicieux.

Au regard des milliards d'euros dépensés chaque année par le pays dans l'éducation et la formation professionnelle, cette situation semble bien incompréhensible. A cet égard, l'état a montré ses limites en ne parvenant pas à éradiquer ce mal. Pire encore, les résultats de la France aux tests PISA, réalisés dans les pays de l'OCDE, montrent que le problème semble s'étendre, puisque de plus en plus d'enfants sortent du cursus primaire sans maîtriser l'écriture et la lecture : un retard qu'il sera difficile de combler par la suite et qui provoquera, à brève échéance, leur sortie du milieu scolaire sans formation ni diplôme. L'échec scolaire perpétuel. Pourtant les différents ministres qui se succèdent à l'Hôtel de Rochechouart [3] ne paraissent pas préoccupés par cela, oubliant au passage que sans ce socle, aucune autre connaissance ne pourra être acquise par les enfants.

Espérons quand même que les propos de M. Macron auront permis à certains de prendre conscience de l'ampleur du problème - même si j'ai peu d'espoir - et des efforts à consentir pour y remédier, à la fois sur les méthodes d'enseignement (le retour à la méthode syllabique, etc.), mais aussi sur le statut des écoles (à qui il faut donner plus d'autonomie) et de leur personnel (recrutement, salaires plus élevés). Plus de liberté et moins de dirigisme associés à quelques réformes permettraient à l'éducation de retrouver la voie de l'excellence, seul véritable moyen de réduire durablement les inégalités et la pauvreté dans le pays.

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[1] Selon les dires de son ex-compagne Valérie Trierweiler.
[2] D'après les chiffres de l'INSEE en 2013 et repris par Le Parisien à ce lien. L'illettrisme avait été désigné grande cause nationale.
[3] Le siège du ministère de l'Education Nationale.

Joueur de poker, un job comme les autres ?

Alors que se déroulent actuellement, et pour quelques jours encore, les célèbres World Series of Poker au Rio All Suite Hotel and Casino de Las Vegas, je trouve une occasion de raconter une petite anecdote sur ce jeu. Mais, tout d'abord, commençons par remonter un peu le temps. Le poker moderne prend son essor dans la première moitié du XIXème siècle, sur les bateaux à vapeur qui remontent le Mississippi [1], et dans les villes côtières, comme La Nouvelle Orléans. Par la suite, il accompagne les populations qui participent à la Conquête de l'Ouest. C'est à cette époque qu'il gagne sa réputation - abondamment reprise par le cinéma ou la télévision - de jeu de "tripot". Très pratiqué dans les saloons, le poker fait et défait des fortunes en quelques minutes, l'argent durement gagné par les uns finissant dans les mains plus opportunistes des autres. Les tricheurs démasqués risquaient, quant à eux, de subir le supplice du "goudron et des plumes".
Une partie poker entre Henry Fonda et Jason Robards dans Gros Coup à Dodge City (1966).

Aujourd'hui tout cela a bien changé évidemment. La diffusion de tournois à la télévision et la création de salles de jeu sur Internet a contribué à démocratiser le poker, qui d'une passion pour quelques-uns est devenu en quelques années un loisir pratiqué par des millions de personnes. Dans la culture populaire, beaucoup assimilent encore le poker à un simple jeu de hasard, où seule la chance, et parfois le bluff [2], permettent de gagner. Pourtant, sa logique repose sur bien d'autres facteurs tels que les mathématiques - il existe en effet un formalisme très développé qui, s'il est connu par le joueur, améliore considérablement ses probabilités de gain - ou encore les agissements et réactions de vos adversaires - ce que l'on nomme "tells" dans le jargon. Combinés ensemble, ces facteurs guident les joueurs dans leur stratégie, le but étant de rester le seul à la table à la fin de la partie.

Mais revenons-en aux World Series. Cette compétition, sorte de championnat du monde de poker, voit d'affronter, chaque année, des joueurs venant de toute la planète, autour des différentes variantes du jeu - Texas Hold'em, Omaha, Stud [3], etc. Pour peu qu'ils aient plus de 21 ans, législation américaine oblige, les amateurs peuvent venir se frotter aux professionnels les plus aguerris avec une chance de les battre et de remporter l'un des fameux bracelets couronnant les vainqueurs de chaque événement [4]. Parmi les grands noms qui se bousculent, on trouve un homme, Billy Baxter, qui depuis plus de 50 ans, fréquente les tables des casinos du pays. Même s'il n'est pas le plus connu de tous, Baxter est à l'origine d'une décision de justice dont les joueurs profitent sans même le savoir.

Né en 1940 en Géorgie, Baxter fréquente dès l'âge de 14 ans les salles de jeux d'Augusta. Il commence par jouer au billard, pratiquant ce que l'on nomme du "hustling" en anglais, une manœuvre qui consiste à paraître faible aux yeux d'un joueur ayant de l'argent, pour mieux le battre et le dépouiller par la suite [5]. Rapidement, avec ce système, le jeune homme gagne plusieurs milliers de dollars. Ses pérégrinations l'amènent à expérimenter le poker, qu'il finance, dans un premier temps, en continuant à jouer au billard. Le succès aidant, il décida de s'y consacrer pleinement. Quelques années plus tard, il devint même propriétaire d'un casino, le Paisley Club, au cours d'une partie. Mis au courant de cela, la police lui intima de fermer le lieu, ce qui acheva Baxter de se lancer dans les paris sportifs, une activité elle aussi très lucrative. Bravant la loi, il continue pourtant d'organiser des parties clandestines de blackjack et de roulette. Lors d'une édition du Masters de golf [6], il se fait prendre par le FBI, ce qui lui vaut ses premiers ennuis avec la justice. Multipliant les recours, il évite la prison pour un temps [7]. Mis à l'écart, Baxter reprend ses activités de joueur de poker.

Au milieu des années 70, alors qu'il revient de son voyage de noce, Baxter, toujours à la recherche de nouvelles tables de jeux, décide de faire une halte à Las Vegas pour quelques mois. Installé dans un hôtel avec sa femme, il commence à écumer les casinos de la ville, et remarque que sa maîtrise du jeu lui permet de défaire sans trop de difficultés des joueurs riches et peu expérimentés qui foisonnent sur le Strip. Autour des tables, il fait la connaissance de quelques tauliers du poker, tels Doyle Brunson [8], Puggy Pearson, Syd Wyman ou encore Stu Ungar [9], avec qui il nouera des liens d'amitiéCes bons résultats aidant, il se présente aux aux WSOP de 1975, et parvient à remporter le premier de ses sept bracelets WSOP [10]. Au vu de ce résultat, il se persuade de pouvoir gagner sa vie en devenant joueur professionnel. Ce faisant, Baxter entame un combat avec l'administration fiscale américaine. Une lutte qui dura près d'une dizaine d'années.

En effet, à cette époque, les gains de jeu sont taxés par le fisc américain à hauteur de 70%, contre 50% pour les revenus provenant du travail. Considérant que jouer est un travail comme un autre - tout du moins pour lui - et non un divertissement, Baxter trouve cette règle injuste. Dans un premier temps, il refuse donc de payer avant qu'un conseiller juridique ne lui fasse changer d'avis. En effet s'il s'acquitte de ses impôts, il évitera les éventuelles pénalités que lui pourraient lui réclamer le fisc et cela lui permettra de poursuivre l'état en justice pour demander la restitution d'une partie de ses revenus. Cette situation dure quatre années, de 1978 à 1981, période pendant laquelle Baxter reverse plus des deux-tiers de ses revenus à l'état.

Saisie, la justice américaine doit déterminer si Baxter travaille au sens propre du terme, c'est-à-dire s'il peut déclarer, ou non, ses revenus en tant qu'activité de "commerce ou d'affaires". A ce propos, la cour conclut que si le joueur a investi "du temps, de l'énergie et des compétences" pour gagner cet argent, alors cela constitue bel et bien un travail et par conséquent le revenu ne peut plus être taxé qu'à hauteur de 50% [11]. Le tribunal ajoute que l'argent misé par Baxter au poker - donc le capital - n'est qu'un "outil de travail" [12] ; le revenu substantiel qu'il en tire provient en fait de ses seules compétences et habiletés au jeu et non de la valeur intrinsèque de la mise de départ. De fait, la justice américaine donne raison à Baxter et demande la restitution du trop-perçu. Prenant connaissance du jugement, le gouvernement américain fait appel de cette décision et perd à nouveau contre Baxter. Acculées les autorités envisagent un temps de porter l'affaire devant la Cour Suprême des Etats-Unis, mais cette solution est vite abandonnée. Baxter a définitivement gagné son bras de fer. Dès lors, il ouvre une brèche dans la manière dont sont considérés les revenus du jeu. Puisqu'ils peuvent être considérés comme des revenus - le tout dépendant des faits et des circonstances - cela signifie que les gains et les pertes sont déductibles de manière à arriver à un bénéficie net. De même, on peut les investir dans des fonds de retraite. Une petite révolution dont bénéficie toujours les joueurs. D'autres pays ont, par la suite, adopté des législations similaires.

Mais plus que la décision de justice elle-même - je n'ai pas les compétences pour la juger - c'est la manière de l'obtenir qui a retenu mon attention : imaginerait-on, en France, un contribuable attaquer en justice l'administration fiscale pour un motif similaire ? On peut en douter puisqu'en l'espèce, l'état a tous les pouvoirs pour légiférer à sa guise, sans pouvoir être inquiété. Dès lors, la démagogie prend le pas sur la logique et on ne s'étonnera pas qu'au nom de la sacro-sainte justice sociale, nos gouvernements successifs aient mis en place une fiscalité punitive pour l'individu qui tente de gagner sa vie par quelque moyen que ce soit. Découragé, et n'ayant aucun recours juridique possible, ce dernier préfère diminuer le volume de son activité ou en dissimuler une partie - la fameuse économie grise - plutôt que de s'acquitter d'impôts toujours plus importants. Une voie qu'aurait pu suivre Baxter s'il n'avait pas eu cet espoir de recours face à l'administration fiscale américaine. Un exemple à méditer.

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[1] Tel que présenté dans le film Maverick - dérivé de la série éponyme des années 50 - de Richard Donner sorti en 1994 avec Mel Gibson dans le rôle principal. A noter que l'acteur James Garner, qui incarne le rôle du marshall dans le film, était le "Maverick" original.
[2] Mais le secret d'un bon bluff, c'est que de temps en  temps, il faut avoir les cartes...
[3] Le Stud est la première variante connue du poker dit ouvert. Existant en deux versions - à cinq (1 carte fermée, 4 cartes ouverte) et sept cartes (3 cartes fermées, 4 cartes ouvertes) - le Stud a été populaire du début du XXème siècle jusqu'aux années 70, à partir desquelles il fut supplanté par le Texas Hold'em. Cette dernière variante est aujourd'hui la plus jouée. A noter que dans le film Le Kid de Cincinnati (The Cincinnati Kid) de Norman Jewison, Steve McQueen joue au Stud à cinq cartes...
[4] Une soixantaine est organisée tous les ans, le plus prestigieux étant le Main Event, un tournoi de Texas Hold'em no limit à 10 000 dollars l'entrée.
[5] Le "hustling" au billard a été rendu populaire par le film de Robert Rossen, L'Arnaqueur, (The Hustler) avec Paul Newman dans le rôle principal.
[6] Créé par le célèbre golfeur Bobby Jones, il constitue le premier majeur de la saison et le seul qui se déroule au même endroit tous les ans.
[7] Il finira par purger une peine de 9 mois et 22 jours de prison au début des années 80.
[8] Doyle Brunson (1933-) alias Texas Dolly a remporté dix bracelets aux WSOP dont deux au Main Event (1976 et 1977). Il a aussi écrit un livre, Super System, dans lequel il explique comment il a gagné plus d'un million de dollars avec ce jeu.
[9] Stu Ungar (1953-1998), dit Le Kid, a remporté trois fois le Main Event aux WSOP (1980, 1981 et 1997). Véritable génie des jeux de cartes, il excellait au blackjack, au gin rami et au poker et a fait fortune grâce à eux. Un temps ruiné - il perdait tous ses gains au craps et aux courses -, Ungar sombre dans l'alcool et la drogue. Son amitié avec Baxter le fait revenir sur le devant de la scène quand ce dernier paie son inscription au Main Event des WSOP 1997, compétition qu'il remporte pour la troisième fois.
[10] Baxter est un spécialiste du "Deuce to Seven", une forme de poker fermé (à cinq cartes) dans laquelle le joueur doit former la plus petite main possible. Selon l'intéressé, le bluff y tient une place d'importance.
[11] La reconnaissance du poker comme travail est classée en tant que "faits et circonstances" ("facts and circumstances" en anglais) par opposition à la création de "biens et de services" ("good and services" en anglais).
[12] "Tool of trade" en anglais.

L'austérité, le mirage français

Depuis la crise économique qui a suivi l'éclatement de bulle immobilière américaine, on entend, ça et là, les politiques français - de quelque bord qu'ils soient - parler de l'austérité qui s’abattrait, prétendument, sur le pays. Mais qu'en est-il vraiment ?

Toujours plus d'impôts...


Depuis 2010, arguant qu'il fallait redresser d'urgence des comptes publics gravement déficitaires - il semblait alors que c'était une découverte pour la plupart des politiques français, alors même que l'état n'a pas enregistré d'excédent budgétaire depuis 1975 - l'exécutif, appuyé par le parlement, a donné un premier tour de vis fiscal, qui fut suivi en 2012 par un deuxième, asséné cette fois-ci par l'actuelle majorité. Autant dire que les deux camps sont d'accord sur les solutions à apporter au problème des finances du pays. Des impôts, qui ne servent non pas à reboucher le trou béant de la dette nationale - ou alors de façon très marginale -, mais à financer des promesses électorales toujours plus généreuses et démagogiques et à contenter certains corporatismes, par l’octroi de quelques privilèges supplémentaires [1].

En réalité, la réduction des déficits provient plus de l’accélération des recettes de l'état, du fait d'une croissance plus vive, que de l'augmentation de la pression fiscale. La nouvelle couche d'impôts votée en 2012 l'a d'ailleurs prouvée : à la fin de l'année dernière, elle ne provoquait pas l'effet escompté et les éminences grises de Bercy durent reconnaître un manque à gagner de près de 11 milliards d'euros de recettes fiscales. Trop d'impôts tue l'impôt. Un point de vue que défendait, jadis, Arthur Laffer - conseiller influent du président Reagan - et qui fut repris par plusieurs dirigeants dans les années 80, dont Margaret Thatcher [2].

...et toujours plus de dépenses


Donc, dans le même temps où l'état augmentait les impôts pesant sur les individus et les entreprises - le taux de prélèvement obligatoire a franchi le seuil des 46% en 2013 -, il a par la même continuer de dépenser plus, tant en pourcentage qu'en euros courants - respectivement 57.1% du PIB et 1150 milliards sur 2013 - : autrement dit, alors qu'il demande aux Français de se serrer la ceinture, l'état, de son côté, ne se prive pas pour s'accaparer toujours plus de richesses et les disperser aux quatre vents, sans se préoccuper de l'efficacité de cette dépense. D'ailleurs au vu des derniers résultats du chômage - dont la courbe ne s'est toujours pas inversée - on peut douter que le système dans l'état actuel fonctionne. Si tel était le cas, je n'écrirais pas ces lignes.

Donc pour résumer, si austérité il y a, elle n'existe pas pour l'état puisque celui-ci ne ralentit en rien son rythme de dépenses. Que les politiques cessent donc de nous dire que l'état "se serre la ceinture", dès que l'on parle d'économies de quelques dizaines voire quelques centaines de millions d'euros, alors même que tous les ans, les dépenses glissent de 30 milliards. Et ceux qui avancent l'idée de diminuer les dépenses de quelques milliards provoquent, systématiquement, à un tollé général, comme celui que doit affronter le gouvernement de Manuel Valls actuellement. On se heurte, ici, à un problème qui dépasse de loin les clivages politiques : dépenser moins, dans l'imaginaire culturel, implique nécessairement que le service rendu perdra en qualité. Plus encore, dès que l'on parle de réduire les dotations, on ne cesse de jouer sur l'affectif de la population, en lui disant, les yeux au bord des larmes, qu'il y aura alors moins d'écoles ou d'hôpitaux. Impensable donc pour tout politique souhaitant conserver son mandat. 

Pour notre classe politique, dépenser plus est donc devenu une règle tacite, un horizon indépassable, à croire qu'aucune autre solution n'est envisagée quand un problème, de quelque degré qu'il soit, se présente. Prenons, l'échec de notre système éducatif par exemple, régulièrement pointé du doigt par les tests PISA. Au lieu d'analyser les raisons de cet effondrement, le politique se contente juste de dire que ces mauvais résultats ont pour cause un manque de moyens alloués au secteur. Dépensons plus et tout rentrera dans l'ordre. Du moins en théorie. Et si au passage on peut acheter la paix sociale avec les syndicats, on fait d'une pierre deux coups.

L'austérité, le signe d'un manque de rigueur


Pourtant, les cures d'austérité sont indispensables si, pendant les années qui les ont précédées, la gestion des finances de l'état a été traitée avec laxisme par ses dirigeants. Si des périodes de déficits peuvent être rencontrées, du fait d'une mauvaise conjecture économique, il n'est pas normal pour un pays qu'elles se prolongent sur plusieurs décennies. N'en déplaise aux gens qui pensent que les services publics n'ont pas pour objectif d'être rentables. Ce genre de raisonnement ne passe pas le cap de la réalité : ne pas savoir gérer sainement les finances d'une entreprise ou d'un état - toute proportion gardées -, ne va qu'un temps avant que le spectre de la dette ne devienne un problème, ne serait-ce que par son financement.

Certains pays, confrontés à une telle situation ont réagi à temps et entrepris des réformes structurelles visant à améliorer l'efficacité des services publics, c'est-à-dire, maintenir la qualité tout en dépensant moins. On peut ainsi citer le Canada, la Suisse ou encore la Suède, et ce à peu près au même moment, au début des années 90. D'autres, au contraire, ont cédé à la démagogie en promettant monts et merveilles à la population via de la redistribution de richesses, qui la plupart du temps n'étaient pas créées. Il s'en est suivi le résultat que nous connaissons : l'explosion de leur dette à des moments critiques à causer des dommages sociaux considérables, provoquant chômage et pauvreté. Un choc pour ces pays qui se croyaient pourtant à l'abri.

Bien que critiquées par certains du fait qu'elles augmentent les inégalités, en réduisant la sphère de l'amortisseur social, les cures d'austérité n'en sont pas moins, quand elles sont conduites de manière adéquate, de formidables accélérateurs de croissance. Je m'explique. Assainies, les finances du pays, laissent plus de place à une nouvelle ère d'expansion économique, génératrice de richesses et d'emplois, qui par voie de conséquence, constituent le meilleur moyen de réduire les inégalités sociales dans la population. Concrètement, ces cures d'austérité ont pour but de déplacer un curseur, tout autant fiscal que réglementaire, en redéfinissant le rôle de l'état pour que celui-ci redonne toute sa place aux individus pour qu'ils créent, innovent et redonnent de l'élan à une économie, qui à force de concessions - en lieu et place de réformes - se retrouve incapable de profiter de conjectures favorables, au niveau continental ou mondial. Une sclérose qui, au final, débouchera sur une austérité forcée plutôt que choisie. Si d'aventures la France ne veut pas subir ce sort, il serait heureux que nos dirigeants fassent preuve de courage pour mener à bien le changement dont le pays a grand besoin.

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[1] Au hasard, les régimes spéciaux de retraites non encore réformés et qui pèsent lourdement sur l'économie.
[2] Inventeur de la fameuse courbe qui porte son nom et que nous expérimentons aujourd'hui.

Dividendes ou investissements ?

Le mois dernier, Alternatives Economiques publiait un article [1] dans lequel son auteur, Christian Chavagneux reprochait aux entreprises - notamment celles du CAC40 - de distribuer préférentiellement leurs bénéfices en dividendes. Sur l'année 2013, alors que les profits ressortent en baisse de 8% à 48 milliards d'euros, M. Cahvagneux montre que près de 85% de cette richesse part en dividendes au lieu d'être réinvestis par les actionnaires. Il note - et on peut vraisemblablement le croire - que cette proportion est en constante augmentation depuis les années 80 où cette rémunération de dividendes s'établissait entre 30 et 40% environ. Les dividendes représentent aujourd'hui 2.6 fois plus que les investissement alors que ce n'était que la moitié en 1980.

Conséquence de cette situation, l'appareil productif français est dans un état de sous-investissement depuis des décennies si on le compare à d'autres pays de niveaux économiques équivalents. Le diagnostic est sans appel : sans un revirement de la situation, l'écart avec nos concurrents directs continuera à s'accroître inexorablement.

Mais si l'article pointe les graves lacunes dans le domaine, il ne prend pas le temps d'expliquer pourquoi on en est arriver à un tel déséquilibre entre la rémunération légitime - même si certains diront le contraire - des actionnaires qui, prennent le risque initial, et les investissements nécessaires au développement et à la pérennité de l'entreprise. Il faut donc se poser la question : que s'est-il passé dans le pays depuis les années 80 pour que le centre de gravité des profits se déplace à ce point des investissements vers les dividendes ?

Plusieurs choses. D'une part, depuis cette période, la fiscalité sur les entreprises n'a cessé d'évoluer, revirant continuellement au gré des changements de majorités parlementaires [2]. Tantôt contraignante, tantôt un peu plus avantageuse, cette dernière n'a cessé de se densifier et de renforcer, notamment au niveau des charges salariales, même si l'impôt sur les sociétés a globalement diminué. Cette instabilité fiscale est donc loin de favoriser l'investissement. De fait, les éventuels actionnaires préfèrent récupérer leur mise de départ sous forme de dividende quitte à payer des impôts sur les revenus et le capital - l'ISF ou la CSG par exemple - : au moins, de cette manière, ils limitent les désagréments qu'ils auraient pu avoir en réinvestissant leur argent. Autrement dit, le jeu n'en vaut pas la chandelle.

D'autre part, des réglementations de toutes sortes se sont multipliées dans l'intervalle de temps, à la fois sur le marché du travail - on pense à la fameuse limite des 50 salariés par exemple - ou sur le fonctionnement même des entreprises - contrôles divers et variés, multiplication des procédures. Ajouté à ce que je viens de dire, cela n'incite pas prendre des risques nouveaux dans une entreprise, ou, tout du moins pas en France, dans les conditions telles qu'elles existent. D'autant plus que là encore, le législateur joue ne cesse de modifier les règles du jeu. Limiter l'innovation du fait de l'existence du principe de précaution, truffer les lois de garde-fous divers et variés afin de mettre un terme définitif à la fameuse concurrence déloyale, tout cela complique sérieusement la vie des entreprises depuis des années. Et l'arrivée d'une nouvelle équipe gouvernementale - même animée des meilleures intentions - ne rassure pas plus les chefs d'entreprise.

Découragé par toute cela, notre tissu entrepreneurial n'investit plus, innove moins et restreint, par conséquent, sa production de richesses et par la même, sa création d'emplois. Le soutien que devrait lui apporter l'état pour favoriser son expansion et sa conquête de nouveaux marchés est quasi inexistant. Un comble alors que sans lui, tout rebondissement de l'activité économique du pays est impossible. Pendant que nos dirigeants palabrent et ne cessent de s'agiter comme des cabris en annonçant des mesures mortes dans l’œuf, David Cameron, le Premier Ministre britannique, vient d'envoyer une lettre d'encouragement aux entrepreneurs de son pays [3]. Un état d'esprit bien différent du nôtre mais qui a permis au Royaume-Uni - même s'il reste aux abois au niveau budgétaire - de retrouver le chemin de la croissance [4], condition indispensable pour que le chômage et la pauvreté régressent.

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[1] Que le lecteur pourra consulter au lien suivant.
[2] On se souvient encore de cette lubie de taxation de l'EBE.
[2] Une lettre qu'a reçu Gaspard Koenig et que vous pouvez découvrir à ce lien.
[3] La plus élevée des pays développés pour cette année.

La vie des autres

"Si on sait que potentiellement on peut être écouté et qu'on n'a rien à cacher, il n'y a pas de problème à être écouté". Cette phrase, apparemment anodine, a été prononcée sur BFMTV par Benoît Hamon, ministre délégué à l'Économie sociale et solidaire et à la Consommation, au sujet de l'affaire des écoutes du président Sarkozy. Elle a rapidement provoqué la colère de certains membres de l'opposition - parmi lesquels Nathalie Kosciusko-Morizet [1] et Bruno Le Maire [2] - qui y voient une dérive autoritaire des institutions de la république et je ne peux que m'associer à cette observation [3].

Pourtant à bien y regarder de près, la déclaration de M. Hamon s'inscrit dans la continuité des propos de son collègue Manuel Valls, qui se disait choqué, il y a quelques semaines, que les Etats-Unis sacralisent à ce point la liberté d'expression de leurs citoyens. Au nom de la sécurité, ces deux ministres sont donc en train de justifier l'invasion de notre vie privée par les services gouvernementaux - comme si nos existences n'étaient déjà pas assez contrôlées comme cela -, tant et si bien que le périmètre non observable par l'état se réduit comme peau de chagrin. Pour vous en rendre compte, regardez le nombre de caméras de vidéosurveillance qui sont installées dans les rues des grandes villes de nos jours. nos faits et gestes sont épiés en permanence, sans, pour autant, que la délinquance ne recule.

A en croire ces membres de l'exécutif, aucun motif ne paraît nécessaire pour espionner la population. Dès lors, nous entrons dans le domaine de l'arbitraire, avec toutes les conséquences que cela peut avoir. Rappelons-nous le film La vie des autres, où un auteur de théâtre, jugé trop subversif par quelques oligarques du régime est-allemand, fut surveillé étroitement par la police secrète, la tristement célèbre Stasi, échappant de peu à la mort [4]. Au risque de contredire Benoît Hamon, l'état de droit, dans lequel nous sommes censés vivre, ne laisse aucune place à ce genre de comportement. A moins que l'on m'ait menti, chose à laquelle je ne peux pas croire un instant. Vouloir garder un œil sur chaque individu, qui plus est s'il n'est coupable de rien, est le propre des régimes autoritaires craignant que la population ne commence à remettre en cause l'ordre, injustement, établi.

La boîte de Pandore semble s'ouvrir un peu plus chaque jour en France et on ne peut exclure que Big Brother is already watching you [5]. Glaçant, même si nos dirigeants tentent, maladroitement, de nous rassurer, nous enfumant de déclarations tout en manipulant - au second plan - l'appareil législatif pour arriver à leurs fins. Assommé par cette propagande, le citoyen finit par y croire que cette surveillance systématique n'est pas une atteinte à ses droits fondamentaux. Après tout, cela ne devrait pas le déranger le moins du monde, puisqu'il n'a rien à se reprocher.

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[1] Déclaration de Nathalie Kosciusko-Morizet, reprise par Le Figaro et disponible à ce lien.
[2] Déclaration de Bruno Le Maire, reprise par Le Figaro et disponible à ce lien.
[3] Mais comprenez-moi bien, si Nicolas Sarkozy a enfreint la loi, il doit être jugé comme tel. Ce n'est pas cela que je remets en cause.
[4] Réalisé par Florian Henckel von Donnersmarck et sorti en 2006, il a obtenu l'Oscar du meilleur film étranger.
[5] Que George Orwell veuille bien me pardonner pour avoir, quelque peu, changé sa formule.

Droit du travail : les escabeaux de la discorde

A quelques mois de la cueillette des fruits, activité qui permet à quelques lycéens ou étudiants de gagner de un peu d'argent pendant les mois d'été, une directive européenne, confirmée par un décret du ministère du travail, vient d'interdire aux jeunes de 16 à 18 ans d'utiliser des escabeaux [1]. Des chutes malheureuses ont certainement convaincu nos chers bureaucrates européens - et français - qu'il fallait instaurer de nouvelles règles dans le domaine, afin de limiter les accidents. Dès lors, un problème engendre une interdiction, là où de simples recommandations d'usage auraient pu suffire. En effet, qui n'a jamais vu une personne se contorsionner sur un tel engin au lieu de descendre et de le déplacer ?

De son côté, l'Allemagne a eu une interprétation quelque peu différente de la décision européenne, en limitant à 3 m la hauteur maximale à laquelle pouvait travailler un jeune. Une manière de contourner cette règle dépourvue de bon sens et on peut parier qu'elle n'affectera pas outre Rhin l'emploi saisonnier de jeunes.

Mais en France, le législateur tout puissant est allé plus loin sans penser aux conséquences que cela pouvait engendrer. Au delà des considérations de sécurité, le décret pose un problème économique, puisque la main d'oeuvre étudiante lors des cueillettes de fruits représente un quart des emplois saisonniers employés dans ce secteur. Quel producteur ira donc engager des jeunes pour effectuer ce travail, s'ils n'ont plus le droit de monter sur des escabeaux ? Plus inquiétant encore, où est-ce que l'on pourra trouver le personnel manquant pour les remplacer ? De ce fait, on pénalise les deux parties. Et cela ne s'arrête pas là puisque bien d'autres travaux d'été requièrent l'utilisation de ce type d'équipement.

Cette décision nous interpelle une nouvelle fois sur l'interventionnisme excessif du politique dans l'économique, puisqu'elle complexifie - voire interdit - un peu plus les contrats qui peuvent se nouer entre deux entités. Au final combien d'emplois, y compris saisonniers, ne seront pas créés à cause du zèle de quelques technocrate et de réglementations superflues ? Des centaines de milliers sinon plus. Au moment où le pays tente de lutter contre le chômage, notamment celui des jeunes, par tout un tas de mesures onéreuses et inefficaces sur le long terme, il est dommageable que l'on contraigne autant l'accès au travail. Un problème récurrent de nos sociétés depuis près de 40 ans. Il n'est pas étonnant donc que notre pays compte plus de 5 millions de personnes en recherche d'emploi.

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[1] Information rapportée par France Info et disponible à ce lien.

Einstein sur le capitalisme

Albert Einstein, probablement l'un des grands savants de l'histoire, théoricien de la relativité restreinte et générale, a également réfléchi sur des sujets politiques et philosophiques et les a regroupées dans un ouvrage intitulé Comment je vois le monde. Je vous en livre l'une d'elles, telle qu'il l'a écrite :
"Le capitalisme a suscité les progrès de la production mais aussi ceux de la connaissance, et ce n'est pas un hasard. L'égoïsme et la concurrence restent hélas plus puissants que l'intérêt général ou que le sens du devoir. En Russie on ne peut même pas obtenir un bon morceau de pain. Sans doute suis-je trop pessimiste sur les entreprises étatiques ou communautés similaires mais je n'y crois guère. La bureaucratie réalise la mort de toute action" [1]. 
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[1] "Production et travail", dans Comment je vois le monde (1934-1958), chap. 2 "Politique et pacifisme", p. 85 (traduction de 1989).

Rien n'est jamais gratuit

Alors que les sondages lui sont encore défavorables - elle est donnée perdante dans le XIVème arrondissement où elle se présente - et que les candidatures dissidentes se multiplient - notamment celles de Charles Beigbeder - Nathalie Kosciusko-Morizet continue de faire des propositions, que l'on peut qualifier de désespérées, à quelques jours du premier tour des municipales. Parmi elles, une a particulièrement attirée l'attention des internautes : la candidate propose de rendre les transports gratuites pour les étudiants entre 18 et 22 ans [1]. Si certains, notamment les premiers concernés, se sont réjouis d'une telle mesure, dont le coût est évalué à 35 millions d'euros, d'autres, en revanche se sont montrés plus critiques, reprochant à NKM de jouer de démagogie, puisque dans le même temps, la jeune femme promettait des baisses d'impôts pour attirer dans ces filets quelques électeurs indécis et tenter de renverser la tendance [2].

Outre son coût prohibitif, surtout pour une ville déjà fortement endettée, cette mesure est encore une illustration du principe de Frédéric Bastiat, "ce qu'on voit et ce qu'on ne voit pas". Ce qu'on voit, c'est que les étudiants n'auraient plus à payer leurs titres de transport ce qui pourrait alléger leur budget, déjà bien plombé par les loyers de la capitale est de ses alentours. Ce qu'on ne voit pas, c'est que d'autres devront payer à leur place ces titres. Des dépenses supplémentaires pour les autres usagers de ces moyens de transport ou pour les contribuables, qui ne pourront donc pas utiliser librement leur argent.

Dès lors déclarer que ce service sera gratuit pour une catégorie de la population revient à mentir effrontément aux yeux de la population. Qui plus est, on camoufle soigneusement la vérité, à la fois aux bénéficiaires ainsi qu'à ceux qui devront payer la facture. D'ailleurs, même les jeunes qui pensent, à tort, être exemptées de tout paiement, finiront par y contribuer, d'une façon ou d'une autre, par l'un des nombreux mécanismes de prélèvement - le plus souvent invisibles - qui foisonnent dans notre pays. Au final, si vous vous posez la question de savoir qui paie pour un service gratuit auquel vous avez accès, regardez-vous dans un miroir et vous constaterez que vous n'y êtes pas étranger.

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[1] Promesse de campagne rapportée par le journal Le Figaro et disponible à ce lien.
[2] Une autre promesse de campagne rapportée cette fois-ci par le journal Les Echos et disponible à ce lien.

Vers des ministères régaliens

L'idée revient périodiquement, notamment quand les résultats d'un gouvernement se font attendre et que les sondages sur l'action du pouvoir atteignent des plus bas inquiétants. La population gronde et demande du changement. Autrement dit, elle réclame des têtes nouvelles, susceptibles de mettre en place une politique plus efficace et d'améliorer la situation. Un remaniement ministériel - voire dans des cas plus rares une dissolution de l'Assemblée Nationale - intervient alors. Par cette décision, plus symbolique qu'autre chose, le président entend prendre en compte les griefs des électeurs, qui très souvent viennent de le sanctionner lors d'un scrutin électoral intermédiaire [1].

Peu avant cet échec, la majorité en place, appuyée par les ténors des partis dont elle est issue, avait préparé le terrain, prônant le retour à la simplicité et défendant la nomination d'une équipe gouvernementale resserrée autour de quelques personnalités emblématiques. Fini donc la multiplication des ministres, ministres délégués et autres secrétaires d'état, qui ont été nommés - en trop grand nombre - dans la foulée de l'euphorie d'une victoire électorale, déjà lointaine. Dans le même temps, quelques proches du président jouent des coudes pour se voir confier l'un des précieux porte-feuilles et qui leur permettra de prendre pied au niveau national pour les futures échéances à venir.

Dans une étude récente, le député René Dosière estimait que la suppression d'un de ces ministères pouvait engendrer environ 10 millions d'euros d'économies. Et par suppression, on entend ici la seule disparition du cabinet et des dépenses afférentes, ses compétences étant réattribuées à un autre ministère [2]. Une partie du personnel est également réaffectée à d'autres postes et on peut imaginer d'ici le gigantesque capharnaüm que cela doit être de les déménager à la faveur de ces petits arrangements entre amis.

Instabilité du système


Actuellement, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault compte trente-sept membres [3]. Outre les postes traditionnels des affaires étrangères, de l'intérieur, de la défense ou encore de l'économie, on trouve plusieurs ministères dont on peut raisonnablement questionner l'utilité dans le débat public. A-t-on vraiment besoin d'un ministre délégué à "la réussite éducative" ou à "l’agroalimentaire" ? Même si on peut considérer que ces sujets sont importants, était-il à ce point nécessaire de les institutionnaliser de la sorte ? Et ces exemples ne sont pas isolés. Il semble qu'à peine portée au pouvoir, une majorité se croit obligée - pour prouver à la population qu'elle agit et est indispensable - de créer de nouveaux ministères, qui selon elle, apporteront une réponse plus efficace aux problèmes des Français. Ainsi se rappelle-t-on qu'à son arrivée à l'Elysée, François Mitterrand avait inventé un "ministère du temps libre" [4] pour s'occuper des loisirs des Français.

Le cynisme, qui me caractérise, me fait plutôt dire qu'il s'agit avant tout d'occuper le terrain médiatique. A la vérité, on ne tire aucun bénéfice à alourdir un peu plus le monument national qu'est devenu notre mille-feuilles administratif. On ne fait que compliquer ce qui l'est déjà.

Parallèlement à cela, les périmètres des ministères ne cessent d'être redécoupées suivant l'humeur du président et des privilèges qu'il entend accorder à tel ou tel proche. On constate dès lors que des attributions changent de main à chaque remaniement, et qu'il devient difficile pour le commun des Français de savoir, au bout de ce jeu de chaises musicales, qui s'occupe de certains dossiers [5]. Les membres les plus influents de l'entourage du président se retrouvent même bombardés à la tête de "super-ministères", selon la formule consacrée, avec des prérogatives tellement larges, qu'on se demande comment ils peuvent gérer tout les sujets, étant obligés de jongler entre plusieurs à la fois, ce qui résulte en leur connaissance partielle.

Fixer les choses une fois pour toutes


De ce point de vue, notre pays aurait beaucoup à apprendre de ce qui se fait en Allemagne ou même aux Etats-Unis, où le nombre de ministères reste généralement stable tout comme le périmètre de chacun d'entre eux. Le système d'organisation décentralisée permet, dans ces deux cas, de déléguer plusieurs missions aux collectivités territoriales, ce qui allège d'autant celles de l'état. Au contraire, le type d'administration pratiqué en France, par son centralisme, directement hérité de l'Ancien Régime, devient étouffant et à trop vouloir contrôler de sujets, l'état en oublie l'essentiel et provoque des catastrophes. On pense, par exemple, au morcellement du système éducatif, dans lequel l'état, les régions, les départements et les villes se partagent la gestion des différents niveaux, avec les résultats que l'on connait.

Comme disait Ronald Reagan, "ne demandez pas à l’État de résoudre votre problème, car votre problème c'est l’État". De fait, l'état gagnerait à desserrer l'étreinte qu'il impose à la société française et à se désengager de certains sujets. Au final, les individus finiraient par trouver des solutions aux problèmes qui se posent à eux. L'administration centrale pourrait alors juste se contenter de donner quelques grandes orientations générales et se concentrer sur les dossiers régaliens que sont la justice, la défense, les affaires étrangères ou encore la sécurité intérieure. Ce faisant, il devient de plus en plus urgent et opportun de graver dans la loi ces domaines où l'état peut intervenir et limiter ainsi son action à eux seuls, laissant aux individus, librement associés, de s'occuper du reste.

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[1] Comme les prochaines municipales par exemple.
[2] Dosière est un spécialiste du sujet. Une interview de lui a été réalisée voici quelques jours par le journal Le Figaro et est disponible à ce lien.
[3] D'après les informations officielles en mars 2014.
[4] Le constructiviste Léo Lagrange (1900-1940) l'avait imaginé dès les années 30.
[5] On remarquera à cette occasion que des noms pompeux son Les noms s'allongent ou se raccourcissent 

Le hockey, sport le plus populaire à Sochi

J'évoquais, il y a quelques jours, ma déception quant à la mauvaise couverture médiatique du tournoi olympique de hockey sur glace par France Télévisions, qui dispose du monopole de diffusion des épreuves. J'ajoutais, à cette occasion, que la popularité de ce sport était bien mal récompensée et, qu'à cet égard, il aurait mérité d'être plus amplement retransmis.

En parcourant les informations du jour, je m'aperçois que Twitter a publié des statistiques sur le nombre de messages envoyés concernant les Jeux Olympiques de Sochi, si tant est qu'ils soient affublés du hashtag #Sochi2014. Comme on s'y attend, des pics d'envois ont été observés à certains moments clés - qualification, médaille d'or, etc. - de la compétition. Twitter a comptabilisé les cinq événements les plus commentés par les utilisateurs du réseau. Je vous laisse en prendre connaissance.
Au regard de ces données, il s'avère que quatre des cinq événements les plus plébiscités, par les internautes concernent des matches de hockey sur glace. Et cela ne doit rien au hasard. La participation des stars de la Ligue Nationale nord-américaine, ainsi que l'engouement de la Russie pour ce sport a attiré le regard des téléspectateurs du monde entier, qu'ils soient amateurs du sport ou non [1]. La France n'échappe pas à la règle, et j'ai pu constater par moi-même, que de nombreuses personnes se désolaient de ne pas pouvoir suivre certaines parties. Une raison de plus d'inciter France Télévisions - ou tout autre chaîne d'ailleurs - à revoir son dispositif de retransmission pour la prochaine échéance olympique.

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[1] Dont moi, mais cela ne vous étonnera certainement pas...

On n'a pas peur de Big Brother

Ce matin, Orange et Terrafemina publiaient un sondage dans lequel on questionnait les Français au sujet de la surveillance des communications électroniques. Il en ressort qu'un majorité ne se fait pas d'illusions : ils savant que leurs messages, leurs emails ou leurs appels téléphoniques peuvent être espionnés par les services de renseignements de par le monde, mais il semble, néanmoins, qu'ils se sont résignés à protester contre cet état de faits [1].

Deuxième point inquiétant de cette étude, 59% des Français pensent que la surveillance des communications permet d'améliorer la lutte contre la criminalité et autres terrorismes dormants, même si cela porte atteinte à leurs libertés fondamentales, notamment ici, le droit à une vie privée. Pour une majorité, ce type d'intervention de l'état peut être justifié au nom de la sécurité due à tout un chacun. Cette réponse me rappelle une phrase de Benjamin Franklin, l'un des acteurs de la Révolution Américaine qui disait très justement la chose suivante "Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux".

Laisser un état devenir Big Brother, lui abandonner de plus en plus de nos libertés, cautionner les paroles de nos dirigeants politiques - Manuel Valls en tête, comme je le rappelais il y a quelques temps - et les décisions du Parlement auxquels ils sont associés - souvenez-vous du récent vote de l’article 13 de la Loi de Programmation Militaire, qui autorise certains services de sécurité à accéder à des données facilitant la géolocalisation, et ce sans l'accord d'un juge -, n'est pas de bonne augure dans un pays qui est régulièrement pointé du doigt pour s'asseoir de plus en plus sur les libertés individuelles, pourtant garanties par la constitution. Des immiscions de plus en plus importantes qui, si la population n'y prend pas garde, se généraliseront à d'autres secteurs de la vie de tous les jours, ce qui .

Aujourd'hui, il semble que tous garde-fous législatifs, normalement institués pour empêcher cela, tombent les uns après les autres sous les coups d’un exécutif omnipotent, rendant les individus vulnérables et à la merci d'un état toujours plus vorace. Paradoxalement, cher lecteur, ce dernier est très certainement plus dangereux que les "marchés" qu'il passe son temps à dénoncer. La sensation de sécurité qu'il tente d'inspirer est trompeuse et la sempiternelle justification "c'est pour votre bien qu'on procède ainsi", n'est en rien rassurante pour nous.

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[1] Les résultats de l'enquête sont disponibles à ce lien.

Pénalité à France Télévisions

J'aime le hockey sur glace. Plus même, j'adore ce sport. A cet égard, le tournoi olympique de Sochi, qui a vu défiler les meilleures équipes - Russie, Suède, Finlande, Etats-Unis ou encore Canada - et les plus grands joueurs de la planète, qu'ils évoluent en KHL, la ligue professionnelle russe, ou en LNH, la Ligue Nationale nord-américaine - qui, chose notable, avait une nouvelle fois fait l'effort de suspendre les matches de la saison régulière pour faire le déplacement en Europe, montrant par là toute la considération qu'elle porte à cette grande compétition - aurait dû m’enthousiasmer au plus au point. Il n'en a rien été. La mauvaise diffusion des rencontres a gâché le spectacle, qui, en termes de qualité de jeu, est pourtant à ranger au même niveau que l'on peut admirer lors de la Coupe du Monde de football ou de la compétition olympique de basket-ball.

En France, la diffusion des épreuves échoit à France Télévision, qui en a acquis le monopole depuis maintenant plusieurs éditions maintenant. Basculant d'un site à l'autre, les journalistes tentent de couvrir l'ensemble des épreuves de cette olympiade. L'exercice - difficile en soi - devient périlleux quand une chaîne seulement est chargée d'assurer tout le travail. On passe ainsi du ski de fond au patinage de vitesse en quelques secondes avant de revenir au half-pipe pour quelques instants. Résultat, les amateurs de chacune des disciplines resprésentées, restent sur leur faim, frustrés et déçus de voir leur épreuve favorite remplacée par une autre. Impossible, ou presque pour eux, d'en suivre une en entier. En plus de ces coupures intempestives, un résumé des meilleurs - et des pires - moments de la journée, ne cesse d'être rediffusé, alors même que des compétions se déroulent en direct [1]. Ajoutez à cela des commentaires plus que navrants de la part des journalistes de la maison et vous manquez plusieurs moments cruciaux de la quinzaine. 

Et c'est encore plus vrai pour le hockey, tant tout peut basculer très rapidement dans ce sport. Bien sûr, je peux comprendre que tous les matches - notamment ceux des poules [2] - ne soient pas diffusés dans leur totalité. Mais pour les parties plus importantes, telles la finale féminine ou les demi-finales hommes par exemple, j'avoue mon incrédulité. Imaginez donc que l'on ne diffuse pas des rencontres équivalentes dans une compétition de football ou de rugby. Impensable, non ? C'est pourtant le traitement que réserve France Télévisions à ce sport, qui même s'il n'a pas beaucoup d'écho en France, représente un bon divertissement et un moyen non négligeable de le promouvoir auprès des plus jeunes.

La seule alternative, pour ceux qui ont le courage, consiste à écouter les directs - dépourvus de commentaires - sur internet quand ceux-ci sont disponibles [3]. Il semble en effet que le service public décide de faire un peu ce qu'il veut avec les droits de diffusion, bloquant certains canaux, interdisant, de fait, au spectateur - qui est aussi un contributeur puisqu'il paie sa redevance - de regarder une épreuve. Quelque peu scandaleux.

La couverture médiatique mise en place par France Télévisions pour ces Jeux est, à cet égard, bien en deçà de celle disponible dans d'autres pays. Petite revue d'effectifs. Aux Etats-Unis par exemple, le diffuseur officiel NBC s'appuie sur six chaînes pour assurer une bonne retransmission des épreuves pour un total de 1500 heures de direct [4]. En Grande Bretagne, la BBC propose, quant à elle, plus de 2500 heures de diffusion [5]. Enfin, au Canada, cinq chaînes se partagent la retransmission des épreuves, ce qui assure au spectateur un large choix. Et j'en passe. Pour le bien du sport, il serait bon qu'un système équivalent existe en France, soit par une mise en concurrence des chaînes de télévision - Eurosport, BeIN Sports,... - soit en améliorant la qualité de l'offre proposée par l'actuel diffuseur - même si j'ai peu d'espoir de ce coté-là -, tout cela afin de répondre plus efficacement aux attentes du plus grand nombre de spectateurs, ce qui de toute évidence n'est pas le cas aujourd'hui. Un point noir que même les belles médailles françaises n'arriveront pas à faire oublier.

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[1] Encore la preuve au moment où j'écris ces quelques lignes. Les deux premiers buts de la petite finale ne sont pas diffusés.
[2] Même si celui opposant la Russie aux Etats-Unis l'a été.
[3] J'ai pu me rendre compte à plusieurs reprises que les directs n'étaient pas disponibles dans explication aucune.
[4] D'après le Washington Post (lien).
[5] D'après les informations disponibles sur le site officiel des Jeux Olympiques (lien).

Réformer la fonction publique en France ?

L'INSEE, vient de publier son tableau de l'économie française, un document annuel qui renferme tout un tas de chiffres sur l'organisation du pays. Ce matin, le journal Le Figaro en publiait quelques extraits [1]. Une statistique a particulièrement retenu mon attention : 10.9 %. C'est l'augmentation de l'emploi dans la fonction publique française - notamment territoriale - entre 2000 et 2011. Aujourd'hui, les trois fonctions publiques - d'état, territoriale donc et hospitalière - emploient 5.4 millions de personnes, soit 77 agents pour 1000 habitants. La France dépasse de loin des pays comme l'Allemagne qui dispose d'environ 50 fonctionnaires pour 1000 habitants ou bien le Japon qui n'en a que 40. En proportion, l'emploi public représente 19.9% de l'emploi en France. Ce chiffre nous place au-dessus de la moyenne de l'OCDE, qui se monte à 15.5% [2]. Et encore, on ne prend pas en compte ici les 134 000 emplois aidés - comme les fameux emplois d'avenir -, non viables sur le long terme, bien que défendus par les gouvernements de droite comme de gauche. Avec la volonté de l'actuelle majorité d'embaucher du personnel nouveau - notamment dans l'éducation - on peut penser que ces chiffres vont continuer de croître dans l'avenir. 

Les entreprises d'état, de leur côté, emploient près de 800 000 personnes, dont une bonne majorité à EDF, la SNCF et à La Poste. Ces agents, outre la sécurité de leur emploi, bénéficient d'avantages à faire rougir le premier salarié du privé venu. Quelques exemples. Le personnel d'EDF ne paie que 10% de sa facture d'électricité quand dans le même temps, les employés de la SNCF ont le droit à des rabais sur les billets pour presque toute leur famille []. Une série de privilèges, vieux de plusieurs décennies, qu'il est impossible de remettre en cause au nom du sacro-saint contrat social entre la direction et les salariés, ou plutôt les syndicats qui s'empressent de défendre ces droits acquis, un héritage des nationalisations.

Ce fonctionnement de la fonction publique en France énerve de plus en plus la population, d'autant qu'elle constate une dégradation de la qualité de service alors que les moyens déployés sont toujours d'importance. Pourtant, il se semble pas question, pour le pouvoir exécutif, d'évaluer l'efficacité des différentes administrations. Alors que le poids de l'état se fait toujours plus grand dans notre vie de tous les jours, que le pays connait des problèmes de chômages, que la croissance est atone depuis quelques temps déjà, ne serait-il pas opportun de la part de nos élites de reconsidérer sa place dans la société. Des pistes sont déjà connues : fusion de certains services, suppression des doublons... D'autres sont à l'étude comme déléguer au privé certains secteurs de l'économie telle la culture ou le logement.

Des politiques similaires ont été mises en places au Canada ou en Suède dans les années 90 et plus récemment au Royaume-Uni, après l'élection du conservateur David Cameron. Malgré les réformes profondes menées dans ces administrations publiques - diminution du nombre de fonctionnaires, privatisations -, le chômage est moins élevé qu'il ne l'est en France et surtout, la croissance est repartie à la hausse, tout comme les recettes fiscales. Contrairement à la France, ces pays ont choisi de faire porter les efforts sur des économies structurelles et non sur des hausses d'impôts, qui présentent le désavantage d'assécher les canaux de l'investissement et de décourager les individus d'entreprendre. Si l'on ajoute à cette instabilité fiscale, une instabilité législative qui provoque l'émergence d'agences, de commissions toujours plus nombreuses et leur enchevêtrement de décisions, de normes, de paperasse à remplir, on complique le retour de la prospérité économique

De fait, une révolution intellectuelle est nécessaire en France. Un bouleversement de nos mentalités. Chose qui n'interviendra que si l'état prend les bonnes décisions ou incitations et envoie les bons signaux.

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[1] Données disponibles à ce lien.
[2] On atteint plus de 30% en Norvège, pays beaucoup moins peuplé.
[3] Privilèges dénoncés par la Cour des Comptes (lien).

Lake Placid 1980, un miracle sur glace

Entre 1955 et 1991, l'Union Soviétique a affronté soixante-et-une fois les Etats-Unis d'Amérique dans des matches de hockey sur glace. Le bilan est sans appel en faveur de l'équipe rouge :  cinquante-cinq victoires pour seulement cinq défaites et un match nul [1].

La première victoire américaine intervient lors des Jeux Olympiques de Squaw Valley en 1960, lors de la ronde des médailles. Sur leur glace, les Américains battent les Soviétiques 3 buts à 2 et remporteront quelques jours plus tard la médaille d'or devant le Canada. Il faudra attendre vingt ans - et 32 matches - pour que l'exploit se répète à nouveau. Une disette quasiment sans égale dans le sport international. Connue sous le nom de "Miracle sur Glace" [2], cette rencontre, qui se déroule à Lake Placid lors des Jeux Olympiques d'hiver de 1980, est restée dans l'histoire, tant l'intensité de jeu entre les deux équipes avait atteint son point culminant, faisant écho à la dégradation des relations entre l'ouest et l'est. Par la suite, les Américains attendront encore dix années avant de battre à nouveau l'équipe soviétique [3].

Une équipe imbattable


Depuis les années 60, l'équipe soviétique de hockey sur glace est considérée comme l'une des meilleures - si ce n'est la meilleure - au monde. Au niveau international, elle a remporté quatre médailles d'or olympiques de suite [4] - 1964, 1968, 1972 et 1976 - et elle collectionne aussi les titres mondiaux [5]. A l'approche des Jeux de 1980, elle fait donc figure de favorite. Il faut dire que depuis sa troisième place de 1960, elle n'a concédé qu'une seule défaite et un match nul en vingt-neuf parties lors des tournois olympiques[6]. A l'orée de l'édition 1980, seule la Tchécoslovaquie semble en mesure de lui contester le titre [7].

A l'époque, l'URSS compte dans ses rangs des joueurs de renom : le gardien Vladislav Tretyak - considéré, encore aujourd'hui comme, l'un des meilleurs de l'histoire de ce sport -, les attaquants Boris Mikhaïlov - également capitaine de l'équipe - et Valeri Kharlamov ou encore le défenseur Viacheslav Fetisov. Tous membres de l'Armée rouge - ils jouaient pour le célèbre club du HK CSKA à Moscou, maints fois couronné au niveau national -, ces joueurs ont le statut d'amateurs et s'entraînent dans des conditions optimales, les installations de hockey sur glace à l'est n'ayant alors rien à envier à celles de l'ouest. Pour la plupart, ils évoluent ensemble depuis plus d'une décennie, ce qui leur a donné des automatismes et un jeu rapide et précis. Intraitable sur la glace, ils ont pris l'habitude de surclasser certains de leurs adversaires en leur infligeant des scores à deux chiffres, les Etats-Unis n'échappant pas d'ailleurs à quelques corrections [8].

Quant au Canada, la nation reine, puisque c'est dans ce pays que le hockey moderne est né, il délaissé les compétitions internationales, considérant que le niveau de la célèbre Ligue Nationale de Hockey, la LNH [9], est plus élevé que celui proposé par les Soviétiques. Le statut particulier des Jeux Olympiques, où seuls des joueurs amateurs peuvent être alignés,contrarient aussi les intérêts canadiens, qui ne peut pas utiliser les joueurs professionnels de la LNH. Et les championnats du monde, compétition annuelle, du fait du chevauchement des calendriers n'autorisent pas tous les joueurs de la Ligue d'y participer. Pour véritablement affronter les Soviétiques à armes égales, le Canada a organisé avec eux deux séries de matches en 1972 et 1974, pour jauger leur niveau. Vainqueurs de justesse de la première [10] et défaits dans la seconde [11], les Canadiens ont compris qu'une équipe d'amateurs non préparés, n'avait aucune chance contre les rouges. En 1976, le pays à la feuille d'érable décide donc de ne pas envoyer d'équipe de hockey aux Jeux Olympiques, afin de protester contre la trop grande différence de niveau qui résulte, selon eux, du caractère professionnel des joueurs soviétiques. Dès lors et jusqu'au années 90, le Canada ne prendra à cœur qu'une seul compétition, la Canada Cup qui réunit tous les quatre ans environ, les six meilleures nations du hockey mondial [12].

Parti de rien


Mais revenons aux Etats-Unis. En 1979, la dernière campagne aux championnats du monde a été une nouvelle désillusion avec une septième place. Pas de quoi espérer un bon résultat aux prochains Jeux qui se déroulent moins d'un an plus tard. Lors de cette compétition, le joueur canadien Marcel Dionne [13] fut d'ailleurs très critique sur le style de jeu des nords-américains, incapables d'après lui de rivaliser avec ses homologues européens : "Seuls les médias peuvent changer les choses chez nous. Dites-leur comment les équipes européennes jouant avec tant de talent. Dites-leur qu'elles jouent sans se battre. Faites-les se rendre compte que si un gamin ne sait pas patiner et tirer, mais juste se battre, il ne doit pas être autorisé à être un hockeyeur. Il y a tant d'idiots qui dirigent le hockey, si bêtes, si bêtes. Dites-leur" [14].

Alors que les Jeux de Lake Placid se profilent, la fédération de hockey amateur américaine se met en quête d'un entraîneur avec l'objectif de bien figurer dans le tournoi. Pour les dirigeants, la médaille et a fortiori le titre, paraissent inaccessibles. A l'été 79, ils jettent leur dévolu sur Herb Brooks, qui entraîne l'équipe de hockey de l'Université du Minnesota [15], les Golden Gophers, vainqueurs de trois championnats universitaires depuis 1974. L'homme a aussi une solide expérience de joueur : évincé à quelques jours du début de la campagne victorieuse des Jeux de 1960 [16], il a participé ensuite à ceux de 1964 et 1968 et a remporté une médaille de bronze aux mondiaux de 1962. Retraité, il devient entraîneur et acquiert la réputation d'être très exigeant et de pousser son équipe à l'excellence.

Ayant carte blanche, il choisit lui-même les membres de son équipe, pour la plupart issus des Gophers. Il recrute aussi chez leurs plus ardents adversaires, les Terriers de l'Université de Boston [17]. La rivalité entre les anciens joueurs rivaux ne facilitent pas les premiers contacts plutôt froids.

Une préparation difficile


L'équipe constituée [18], Brooks commence l'entraînement à proprement parler. Comme Dionne, il avait fait le constat que les équipes européennes étaient plus disciplinées, plus rapides et plus mobiles que celles de la Ligue Nationale de Hockey, défaut dont héritaient malheureusement les sélections nationales. Selon lui, ces carences expliquent, en grande partie, les difficultés que les joueurs ont rencontré en affrontant les Soviétiques lors de la Challenge Cup en février 1979 [19]. Imposant leur physique au lieu de jouer le palet, ils ont vite été dépassés par la stratégie diabolique de leurs adversaires de l'est, bien plus adroits pour contrôler le palet et marquer. D'ailleurs le résultat ne s'est pas fait attendre. Après avoir remporté le premier match, les All Stars de la LNH s'inclinent dans les deux suivants, concédant, notamment ,une défaite 6 buts à 0 dans la dernière rencontre. Un camouflet. Plus même : une véritable leçon de hockey sur glace.

A l'opposé du jeu traditionnel défendu en Amérique du Nord, Brooks propose de développer un jeu plus rapide, plus technique comme celui de Soviétiques et de lui associer le physique typique du jeu des Canadiens. Une combinaison qu'il croit susceptible de déstabiliser la machine infernale soviétique.

La période précédant les Jeux est également perturbée par un regain de tensions et de conflits sur le plan international. D'une part, l'invasion soviétique en Afghanistan, très critiquée par le président américain Jimmy Carter, a tendu les relations avec les Soviétiques, qui menacent, un temps, de boycotter les Jeux. De l'autre côté, les Américains doivent aussi gérer la prise d'otages d'une partie du personnel de l'ambassade américaine à Téhéran, suite à la chute de leur allié, le Chah d'Iran. C'est donc dans ces conditions pour le moins difficiles que la compétition va avoir lieu en février 1980.

Campagne olympique


Trois jours avant la cérémonie d'ouverture, un dernier test se déroule sur la glace du Madison Square Garden à New-York et oppose pour la première fois depuis les championnats du monde 1978, Soviétiques et Américains [20]. Avant le début du match, Boris Mikhaïlov exhibe fièrement la Challenge Cup, remportée par son équipe un an plus tôt, dans cette même patinoire. Rapidement, les Américains sont débordés par le style de jeu des Soviétiques, qui dominent outrageusement la partie. Au final, les locaux encaissent 10 buts dont trois sont à mettre à l'actif de Vladimir Krutov [21]. La domination soviétique est totale. Herb Brooks et ses joueurs n'arrivent donc pas en pleine confiance à Lake Placid, d'autant que leur groupe est très relevé : ils devront en effet affronter la Tchécoslovaquie, la Suède ainsi que la redoutable Allemagne de l'Ouest. Seules la Roumanie et la Norvège paraissent accessibles à la jeune, et relativement peu expérimentée, équipe américaine.

Le premier match face à la Suède débute très mal. Dominés en première période, les Américains sont sévèrement sermonnés par Brooks pendant la pause et finissent par arracher le match nul avec un but à 27 secondes le fin de la rencontre. Suit une large victoire contre la Tchécoslovaquie, autant inattendue que salutaire afin de poursuivre l'aventure dans le tournoi olympique. Remotivée, l'équipe américaine parvient à remporter les trois dernières parties et termine en tête de son groupe. L'objectif affiché de se qualifier dans la ronde des médailles - un groupe dans lequel s'affronte les deux premiers de chaque poule du tour préliminaire - est atteint. Mieux, les Américains sortent invaincus, ce qui était inespéré. En plus des Etats-Unis, le groupe finaliste est constitué de l'Union Soviétique - qui a remporté ses cinq matches -, de la Suède et de la Finlande.

Un Miracle


Le premier match de ce tour final oppose le 22 février 1980 l'URSS aux Etats-Unis. A voir la manière dont les Soviétiques jouent, beaucoup, pour ne pas dire la totalité des spécialistes, voient les Américains perdre la partie. La veille du match, Dave Anderson, journaliste au New-York Times, écrit la chose suivante : "A moins que la glace ne fonde, ou que l'équipe américaine ou une une autre équipe ne réalise un miracle comme le fit la formation américaine en 1960, les Russes devraient gagner facilement la médaille d'or olympique pour la sixième fois en sept tournois" [22]. Autant dire que l'on donne pas cher de la peau de l'équipe nationale.

Le Field House, la salle qui accueille le match, est plein à craquer. Plus de 8000 personnes se sont ruées pour assister à une rencontre déjà historique. Les spectateurs, majoritairement américains font blocs derrière leur équipe me s'ils savent qu'obtenir la victoire relèvera de l'exploit. La partie débute à 17h00 heure locale et rapidement, les Soviétiques installent leur jeu. Après moins de 10 minutes écoulées, Krutov inscrit le premier but sur une déviation. Les Américains recollent au score cinq minutes plus tard sur un but de Schneider avant que Makarov ne redonne l'avantage à son équipe. Le match semble déjà plus équilibré que celui du Madison Square Garden, une quinzaine de jours plus tôt. Une seconde avant la fin de la premier période, Mark Johnson parvient, sur un palet mal renvoyé par Tretyak, à égaliser. Il y eut d'ailleurs un début de polémique à ce sujet, les Soviétiques déclarant que la période était terminée et que par conséquent le but n'aurait pas dû être accordé.

La deuxième période s'ouvre sur un coup de théâtre. Viktor Tikhonov [23], l'entraîneur soviétique décide de remplacer Tretyak par Vladimir Mychkine, le deuxième gardien russe qui avait fait ses preuves en 79 lors de la Challenge Cup. D'un côté comme de l'autre, personne ne comprend le revirement de Tikhonov, considéré comme le tournant de la rencontre. Il déclarera quelques années plus tard avoir fait ici "la plus grande erreur de sa carrière" [24]. Quoi qu'il en soit, ce changement ne perturbe pas l'attaque soviétique, qui marque un troisième but pendant cette période, sur un avantage numérique. Acculés, les Américains, ne parviennent pas à remettre le pied dans le match. Les Soviétique s'acheminent vers la victoire et probablement vers l'or.

Pourtant, les Américains profitent d'une pénalité, en milieu de troisième période, pour passer à l'offensive. Les Soviétiques défendent vigoureusement les buts de Mychkine, envoyant quelques joueurs américains dans la bande. Cependant, Johnson réussit à trouver une nouvelle fois l'ouverture et marque un troisième but, synonyme d'égalisation. Poussés par la foule, les Américains continuent de presser la défense soviétique et quelques secondes seulement après, Mike Eruzione marque un quatrième but, à moins de 10 minutes de la fin du match. Pour la première fois depuis longtemps, les Américains sont devant au score. Piqués au vif, les Soviétiques s'emparent du palais et tentent de reprendre l'avantage. Faisant feu de toute part, ils mitraillent littéralement le but de Craig qui effectue plusieurs arrêts décisifs. Contre toute attente, leurs adversaires tiennent le choc et se permettent même de mener quelques contre-attaques. Alors que les minutes s'écoulent, les rouges ne trouvent toujours pas la solution et ne sortent pas leur gardien pour faire entrer un sixième joueur de champ, comme le pensaient les Américains. Il semble que Tikhonov n'ait jamais cru à cette tactique, pourtant très souvent payante [25]. La fin du match approchant, la foule américaine commence à compter les secondes restantes après un dernier palet dégagé. Al Michaels qui commente l'événement pour la chaîne américaine ABC, en compagnie du gardien canadien Ken Dryden [26], reprit l'écho de la foule et égrena, lui aussi, les dernières secondes du match : "Eleven seconds, you've got ten seconds, the countdown going on right now! Morrow, up to Silk. Five seconds left in the game. Do you believe in miracles ? Yes !Les Soviétiques sont battus. Les Etats-Unis vennaient de créer l'exploit. Un Miracle.

Ce faisant, les hockeyeurs américains prennent une sérieuse option sur la médaille d'or. Ils l'empocheront définitivement deux jours plus tard, après une victoire sur la Finlande 4 buts à 2 [27]. Les Soviétiques battront, dans le même temps, les Suédois pour s'assurer l'argent.

Épilogue


Malgré cette défaite - qui ne fut pas mentionnée dans le journal d'état soviétique La Pravda - les Soviétiques continueront à dominer le hockey mondial dans les années 80 et ce jusqu'à la chute de l'URSS en 1991. Herb Brooks, quant à lui, poursuivra une longue carrière d'entraîneur jusqu'à sa mort dans un accident de voiture en 2003 [28]. Preuve de sa popularité et de la confiance qu'on lui porte, il sera à nouveau sur la banc américain en 2002, lors des Jeux de Salt Lake City, menant la sélection nationale à la médaille d'argent derrière le frère ennemi canadien, non sans avoir battu les Russes en demi-finale. Quelques jours plus tôt, l'équipe de 1980 au grand complet, avec à sa tête Mike Eruzione, son capitaine, fut chargé d'allumer la vasque olympique. Tout un symbole.

Plusieurs joueurs de l'équipe victorieuse intégreront ensuite la Ligue Nationale et y mèneront de brillantes carrières. Ken Morrow, par exemple, gagnera la même année, la Stanley Cup avec les Islanders de New-York, devenant l'un des rares joueurs à remporter l'or olympique et le championnat nord-américain la même année. Quelques joueurs soviétiques feront de même, une fois la guerre froide terminée, amenant le savoir-faire européen au sein des franchises américaines.

Passé à la postérité, ce match a été choisi comme le plus grand moment de sport du XXème siècle par le magazine Sports Illustrated. Le même journal décerna à l'équipe la récompense de "meilleur sportif de l'année 1980". Plus de vingt années plus tard, le match recevait encore des distinctions : la chaîne ESPN le consacra meilleur match de hockey pour la période 1979-2004. En 2008, à l'occasion de son centième anniversaire, la Fédération Internationale de Hockey sur Glace (IIHF) a élu cette rencontre "match du siècle".

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[1] D'après les statistiques fournies par le site chidlovski.net et disponibles à ce lien.
[2] Miracle on Ice en anglais. Walt Disney Pictures en a fait un film, Miracle, sorti en 2004 avec Kurt Russel dans le rôle de Herb Brooks.
[3] A l'occasion d'un match d'exhibition à Oakland le 21 juillet 1990.
[4] L'équipe avait aussi remporté l'or à Cortina d'Ampezzo en 1956.
[5] Treize titres glanés depuis 1954, auxquels on doit ajouter les titres mondiaux de 1956, 1964 et 1968 qui étaient confondes avec la compétition olympique.
[6] Défaite encaissée le 15 février 1968 - lors des Jeux de Grenoble - contre la Tchécoslovaquie, lors de la ronde des médailles. L'URSS avait perdu 5 buts à 4.
[7] La Tchécoslovaquie a remporté les titres 1972, 1977 et 1978.
[8] Faire une liste serait impossible. On peut retenir une défaite 17 buts à 2 lors des championnats du monde de 1969 par exemple, pour montrer à quel point les Soviétiques s'avèrent dominateurs.
[9] La ligue regroupe des franchises américaines et canadiennes. Parmi les plus connues - et les plus titrées -, on trouve les Canadiens de Montréal, les Bruins de Boston, les Red Wings de Detroit ou encore les Rangers de New-York.
[10] Baptisée Série du Siècle, la compétition se déroule sur huit matches, quatre au Canada et quatre en Russie. Elle est remportée par les Canadiens quatre victoires à trois et un match nul.
[11] Deux ans plus tard, les deux équipes se retrouvent. La série est remportée largement par les Soviétiques par quatre victoires, trois matches nuls et une seule défaite.
[12] La Canada Cup est une émanation des deux Séries du Siècle précédemment citées. Sur les cinq éditions, quatre reviennent au Canada (1976, 1984, 1987 et 1991) et une à l'URSS (1981). L'URSS tombé, elle fut remplacée par la World Cup pour deux éditions, 1996 et 2004.
[13] Marcel Dionne (1951-) est un joueur qui a évolué en LNH notamment chez les Red Wings de Detroit. Il a participé à la victoire canadienne à la Série du Siècle 1972 ainsi qu'à la Canada Cup 1976. Il connait donc bien le jeu des européens.
[14] Citation faite à un journaliste du Globe and Mail présent sur place.
[15] L'état du Minnesota est l'une des terres du hockey américain.
[16] La légende veut que Brooks après la victoire américaine soit allé voir l'entraîneur américain Jack Riley pour lui dire "Well, you must have made the right decision, you won" que l'on peut traduire par "Eh bien, on dirait que vous avez pris la bonne décision puis que vous avez gagné".
[17] Vainqueurs du championnats universitaire 1978.
[18] A l'origine, Brooks choisit 26 joueurs pour n'en garder que 20 pour la compétition olympique.
[19] Qui remplaçait cette année-là le fameux All-Star Game.
[20] Victoire soviétique 9 buts à 5.
[21] Ce que les connaisseurs nomment hat trick ou coup du chapeau en français.
[22] Traduit de l'anglais : "Unless the ice melts, or unless the United States team or another team performs a miracle, as did the American squad in 1960, the Russians are expected to easily win the Olympic gold medal for the sixth time in the last seven tournaments".
[23] Tikhonov remportera finalement trois médailles d'or : les deux premières avec la sélection soviétique et la dernière avec l'équipe de la CEI en 1992 à Albertville.
[24] Fetisov, qui évoluera quelques années plus tard en Ligue Nationale dira à ce propos "coach crazy", littéralement "coach fou", marquant bien son désaveu quant à ce choix stratégique plus qu'hasardeux.
[25] Cette tactique est néanmoins risquée car une contre-attaque est très souvent fatale à l'équipe qui prend le risque.
[26] Récemment retraité de la LNH à ce moment, Ken Dryden (1947-) avait aussi participé, avec Dionne, à la campagne de 1972 contre les Soviétiques.
[27] Alors qu'ils étaient menés 2 buts à 1 à la fin de la deuxième période. Le dernier match contre la Suède se soldera par un match nul.
[28] Il mènera aussi l'équipe de France de hockey à une honorable 11ème place lors des Jeux de 1998 qui se déroulaient à Nagano.