Les diamants : généralités (1)

J'ai évoqué dans un précédent article, l'histoire du diamant bleu Hope, autrefois connu sous le nom Bleu de France, avant qu'il ne soit volé puis retaillé. Emporté par mon élan, je vais continuer à évoquer ces pierres précieuses, qui fascinent les hommes depuis des siècles du fait de ses propriétés. Le mot "diamant" tient son nom du latin "adamas, adamantis", qui signifie indomptable, pour rappeler à tous son caractère inaltérable et éternel. Mais commençons par le début : d'où viennent-ils ?

Formation


Comme chacun a pu s'en rendre compte, les diamants sont assez rares à la surface de la Terre, et même à une profondeur raisonnable. Composés d'atomes de carbone, les cristaux de diamant ne sont pas stables dans l'atmosphère ambiante [1]. En réalité, c'est le graphite, une autre variété de carbone qui est dominante, sur le plan thermodynamique, et qui constitue la majeure partie des réserves de cet élément sur la planète.

Pour que du diamant soit formé, il faut réunir des conditions particulières de pressions et de température qui - en dehors d'un laboratoire - ne peuvent pas être atteintes à moins de se rendre à des profondeurs comprises entre 150 et 200 km [2] - dans des roches de type péridotites ou éclogites -, où règnent des pressions de l'ordre de 45 à 60 kbar [3] et où la température atteint entre 900 et 1300 °C environ. Une fois la cristallisation achevée, les diamants entament leur long et lent voyage avant de nous parvenir, ce qui explique d'ailleurs pourquoi ces pierres sont très âgées - entre 1 et 3 milliards d'années. Cette remontée n'est pas sans danger puisqu'ils sont exposés à des conditions extrêmes. Une fois en surface, les diamants restent prisonniers d'une gangue de kimberlite [4] ou de lamproite, des roches d'origine magmatique, en provenance de grandes profondeurs. Appelées minéraux indicateurs, elles sont la preuve d'un sol généralement assez ancien et riche en diamants.

Les diamants sont connus depuis des millénaires et leur exploitation a commencé très tôt dans l'histoire. A partir de la deuxième moitié du XXème siècle, plusieurs études géologiques ont été menées sur la planète pour diversifier les sources d'approvisionnement. L'aboutissement de ces travaux a permis de découvrir de nouvelles régions diamantifères. Aujourd'hui, l'Australie, l'Afrique du Sud, le Canada, la Russie, l'Inde l'Angola, la Centrafrique ou encore le golfe de Guinée - Liberia, Sierra Leone notamment [5] - abritent les principales réserves de la planète [6]. La plus importante des exploitations minières se trouve à Argyle en Australie. Ouverte en 1985, elle devenait, moins de dix ans plus tard, la première du monde, produisant plus de 30 millions de carats, dont moins de 5% était de qualité gemme, c'est-à-dire utilisable en joaillerie.

Classification générale


Une fois extraits du sol, les diamants passent entre les mains de spécialistes, qui en estiment la valeur marchande. Au fil du temps, des critères stricts ont été établis et sont aujourd'hui reconnus internationalement, même si des différences existent encore. On peut, néanmoins, affirmer ces quelques variations sont mineures et que ces règles sont assez homogènes à travers le monde.

Utilisé par tous, la règle des "4C" a été introduite dans les années 50 par le Gemological Institute of America ou GIA. Elle distingue toute pierre précieuse ou fine selon quatre attributs résumés par l'utilisation de la lettre "C". Je vais les décrire ici.
- Le poids (Carat) : le poids d'un diamant est traditionnellement évalué en carats. Un carat équivaut à 0.2 g. Donc un diamant de 5 carats pèse 1 g. Chaque carat est lui-même divisé en 100 points [7]. 
- La couleur (Colour ou Color) : la couleur d'un diamant, quant à elle, constitue - paradoxalement - pour les diamants incolores, la recherche de l'absence de couleur [8]. On classe ces diamants par une lettre allant de D à Z, D représentant le diamant parfaitement incolore et Z, celui dont la teinte tire vers le jaune et a fortiori vers le brun.
Exemple de l'échelle GIA de couleur pour un diamant incolore.

- La pureté (Clarity) : la pureté demande une observation attentive des spécialistes. Elle consiste à rechercher les imperfections ou les inclusions à la surface ou l'intérieur de la pierre. On répertorie leur nombre, leur taille, leur forme, leur couleur, avant de leur donner un grade correspondant. Plusieurs échelles existent en plus de celle établie par le GIA, même si elles convergent toutes vers une classification similaire. Notablement, celles de la CIBJO (Confédération Internationale de la Bijouterie, Joaillerie, Orfèvrerie des Diamants, Perles et Pierres) et de l'AGS (American Gem Society) peuvent être rencontrées.
Échelles de notation de la pureté pour une pierre précieuse [9].

- La taille (Cut) : cette dernière caractéristique est obtenue après que le diamant soit passé entre les mains d'un tailleur spécialisé. Elle est responsable du brillant de la pierre par un jeu de réflexions de la lumière sur les faces du cristal. Les proportions et la géométrie entrent alors en ligne de compte. Autre point important, le diamant possède une dispersion important ce qui a pour conséquence de faire ressortir les couleurs composant la lumière blanche naturelle, comme le ferait un prisme.

Un cinquième critère intervient aussi : la fluorescence. Elle est obtenue quand on expose le diamant à une lumière de type ultraviolette. Le plus souvent, la pierre réémet une couleur bleue mais qui peut aussi être blanche voire verte ou jaune. On utilise des étalons afin de quantifier cette fluorescence. Elle comporte six niveaux allant de None à Very Strong.

Cas particulier des pierres de couleur


Hormis les diamants incolores que l'on trouve dans la majorité des mines de la planète, on extrait aussi une quantité non négligeable de diamants de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Par exemple, la mine d'Argyle, que j'ai évoquée précédemment, est une source de diamants bruns - dits champagne - roses et roses-pourprés. Ces derniers représentent d'ailleurs plus de 90% de l’approvisionnement mondial. Certaines régions sont, d'ailleurs, renommées pour disposer de couleurs particulières :
- Jaune (et nuances) : Bornéo, Angola, Canada,...
- Vert : Bornéo, Brésil, Centrafrique, Sierra Leone, Venezuela,...
- Bleu : Bornéo, Brésil, Guyana, Centrafrique, Afrique du Sud,...
- Rose (et nuances) : Australie, Centrafrique, Chine, Guinée, Russie, Tanzanie,...
- Brun : Angola, Australie, Brésil, Russie, Côte d'Ivoire,...
- Noir :  Centrafrique.
- Orange (et nuances) :  Centrafrique.

Comme les diamants incolores, les diamants de couleur utilisent la classification des "4C", à ceci près que la couleur n'est plus notée par les traditionnelles lettres, mais par des termes faisant référence au degré d'intensité de la couleur. Il y en a quatre : "Fancy Light", "Fancy, "Fancy Intense" et "Fancy Vivid" [10]. Le terme "fancy" vient de l'anglais et signifie "fantaisie". Le qualificatif associé à ce mot renforce l'intensité de la couleur de la pierre. Typiquement, ces appellations commencent après la lettre Z de la classification du GIA.

Mais d'où provient la couleur de ces diamants ? Pour répondre à cette question, il faut se rendre aux confins du microscopique. Les diamants, comme je l'ai déjà précisé, sont un amoncellement d'atomes de carbones agencés d'une manière précise. En cristallographie, on dirait qu'il forme un réseau "cubique faces centrées". En d'autres termes, un atome de carbone est présent à chaque sommet d'un cube théorique et un sur chaque face de ce cube. Si vous n'arrivez pas à matérialiser l'ensemble, ce n'est pas tellement important pour la suite. En fait, ce qu'il faut comprendre ici, c'est qu'entre les atomes de carbones, il y a des espaces, où peuvent se loger d'autres atomes, souvent plus petits. Si aucun atome autre que le carbone n'est présent, on a affaire à un diamant parfait dépourvu d'inclusions et incolore. En revanche, si des atomes se logent dans les fameux interstices, des colorations peuvent apparaître selon la concentration du perturbateur. Outre cela, des défauts - inclusions lors de la cristallisation, déformations plastiques ou encore défaut liés à l'hydrogène - peuvent aussi être à l'origine de coloration. J'en donne dans le tableau suivant quelques exemples.
Origine des couleurs dans des cristaux.

Ces diamants, plus rares - on estime qu'il existe un diamant de couleur pour 10 000 diamants incolores - que les pierres incolores, sont négociés à prix d'or sur des marchés spécialisés et leurs prix peuvent atteindre des sommes exorbitantes, lors de ventes aux enchères.

Authenticité


Après analyse, chaque diamant reçoit un certificat authenticité ou gemmologique sur lequel est inscrit toutes ses caractéristiques : forme, taille, poids, pureté, couleur, fluorescence, poli, dimensions et proportions de la figure géométrique, défauts notables, date d'émission... Tout cela fait que le certificat décerné est unique et constitue une sorte de carte d'identité permettant de retracer l'historique de la pierre, qui est ainsi authentifier avec certitude. Chaque organisme officiel - le GIA ou l'AGS par exemple -, appose des hologrammes et autres textures particulières afin d'éviter toute contrefaçon des précieux certificats. Il peut également arriver que les pierres soient scellés avant d'être vendues ou encore que l'on grave au laser un numéro permettant de l'identifier facilement. Ces certifications rendues quasi-obligatoires ont un coût non négligeable - qui peut aller de quelques dizaines à plusieurs milliers dépendamment de la pierre que l'on veut certifier - et immobilisent les pierres pendant parfois quelques semaines.

Toutes ces procédures ont été renforcées en 2003 lors de la signature du processus de Kimberley qui visait à contrôler plus strictement le commerce des diamants bruts du fait des conflits sanglants qui se sont déroulés en Afrique dans les années 90.

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[1] J'évoquais déjà cette particularité dans cet article.
[2] Même si le phénomène serait observable jusqu'à 400 km.
[3] Pour mémoire, la pression atmosphérique est de 1 bar.
[4] Directement dérivé de la ville de Kimberly, en Afrique du Sud, autour de laquelle de nombreuses mines ont vu le jour.
[5] Tristement célèbres pour avoir accueilli des conflits avec cette fortune comme étincelle. Les diamants extraits étaient baptisés diamants de sang, ou "blood diamonds" en anglais.
[6] Liste non exhaustive.
[7] 1 point = 1 centième de carat.
[8] L’utilisation du terme "blanc" est impropre puisqu'elle renvoie aux diamants spécifiquement blancs.
[9] A noter que la significations des acronymes est quelque peu différente selon l'échelle.
[10] On trouve aussi les mentions "Fancy Dark" et "Fancy Deep".

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